Cinq têtes coupées: Massacres coloniaux : enquête sur la fabrication de l’oubli

Un jour de 2022, Daniel Schneidermann se trouve au musée de l’Armée et découvre une photo d’une atrocité coloniale, publiée dans L’Illustration : cinq têtes « indigènes » coupées. Cette image, qui date de la conquête du Mali et du Niger en 1891, alors appelés le « Soudan français », représente un tournant majeur. Pour la première fois, grâce aux avancées de la photographie, l’opinion publique peut visualiser la brutalité de la conquête. Avant cela, on ne parlait que de faits glorieux et de la mission civilisatrice de la France. Pendant la construction de la Tour Eiffel, la « Belle Époque » s’est également révélée être une période décisive pour les conquêtes coloniales, accompagnées de massacres, souvent ignorés par le gouvernement et la presse. De nombreux militaires et officiers y ont perdu la raison, atteignant même le crime contre l’humanité.

Ce livre constitue une enquête sur la fabrication du déni à grande échelle, depuis cette époque jusqu’à nos jours. En partant de cette image, l’auteur explore la propagande coloniale de l’époque, tout en s’interrogeant sur sa propre ignorance et sur la persistance actuelle d’une certaine indifférence blanche. *Cinq têtes coupées* dresse le tableau d’une période refoulée et dresse le portrait de ces « héros » de la colonisation, dont la popularité semble aujourd’hui inimaginable. Il examine comment on occulte un tel événement historique. À une époque où les ex-colonies s’émancipent vigoureusement de la Françafrique, n’est-il pas temps de confronter ensemble cette histoire ?

Daniel Schneidermann est journaliste et créateur de l’émission « Arrêt sur images ». Spécialiste des récits médiatiques, il est aussi l’auteur de *Berlin, 1933. La presse internationale face à Hitler* (Seuil, 2018), qui a remporté le prix des Assises du journalisme en 2019.