Et moi, et moi, et moi

Les mémoires de Jacques Dutronc

La guerre et la nuit ne s’accordent pas. Si possible, évitez de naître la nuit en pleine guerre. Ça m’est arrivé, et je peux vous dire que ce n’est pas une bonne idée. C’était le 28 avril 1943. Courir dans Paris en défiant le couvre-feu, sans laissez-passer, n’est pas non plus recommandé. Pourtant, mon père n’avait pas d’autre choix : sa femme Madeleine était sur le point de me donner la vie. Il s’est donc précipité au commissariat le plus proche, mais il est tombé sur la Kommandantur, le seul bâtiment éclairé. Là-bas, on lui a indiqué le poste de police qui a dépêché une estafette. J’ai donc échappé de justesse à une naissance dans un panier à salade. Finalement, j’ai attendu d’être à la clinique, près de la porte de Champerret, pour pousser mon premier cri. Il était 5 h 20 du matin.

Je n’étais pas le premier enfant du couple : mon frère Philippe m’avait précédé dans ce rôle. Je n’étais pas non plus le premier Jacques Dutronc , on m’a donné le prénom d’un de mes oncles, tombé au champ d’honneur le 7 juin 1940. Avant même de naître, j’avais déjà ma tombe au Père-Lachaise. J’avais pris de l’avance.

La Trinité, Johnny Hallyday, Les Play-Boys, les premiers galas, Jacques Lanzmann, Serge Gainsbourg, les escapades au Maroc, Maurice Pialat, Claude Sautet, Jean-Luc Godard, Merde in France, les cigares, l’alcool, la Corse… À sa manière inimitable, Jacques Dutronc se souvient et raconte. En lire plus.