Condorcet, 1743-1794

Il était temps de redonner à un intellectuel exceptionnel, philosophe et homme politique, la place qui lui revient. Grâce à Elisabeth et Robert Badinter, cela est désormais accompli. Leur ouvrage sur Condorcet corrige une injustice qui perdurait depuis trop longtemps envers cet homme brillant, qui a consacré sa vie à lutter contre toutes les iniquités. Claude Servan-Schreiber et Marie-France nous rappellent que Condorcet était un intellectuel, un philosophe, un défenseur des Noirs, des Juifs, des femmes, ainsi qu’un abolitionniste convaincu et un militant engagé. Il partageait sa vie avec Sophie, une femme aussi belle qu’intelligente, connue pour son esprit éclairé. Il n’est donc pas surprenant que le ministre de la Justice, qui a fait voter l’abolition de la peine de mort, et sa femme, philosophe et féministe passionnée par le Siècle des Lumières, aient été attirés par lui.

La question posée par le sous-titre de ce livre, « un intellectuel en politique », mérite d’être examinée. La pensée de Condorcet a-t-elle évolué ? Le Condorcet des débuts, celui qu’Élisabeth Badinter décrit, est-il le même que le révolutionnaire de 1789 étudié par l’ancien ministre de la Justice ? Ce questionnement, loin d’être théorique, revêt une dimension intime et même brûlante. La réponse que nous offre ce Condorcet est éclairante.

Les auteurs, sans doute parce qu’ils sont deux, évitent d’intervenir en leur propre nom. Ils se consacrent à un travail d’historiens, plutôt que d’essayistes. Cependant, quel magnifique ouvrage ! Sobre, approfondi, il est empreint de touches discrètes et de tendresses évidentes.